La lueur dans la pénombre

La saison 2024-2025 du Stade Rochelais aura été une campagne assez éprouvante tant pour le club que pour les supporters. Si le collectif est toujours le pilier de l'identité maritime, certaines individualités se sont distinguées dans cette saison à deux visages. Entre leadership technique, confirmations attendues et révélations inattendues, voici les joueurs à retenir de cette saison pleine d’enseignements.


Clap de fin de ce millésime 2024-2025 pour le Stade Rochelais bien que conclu beaucoup trop tôt pour un club qui a pour ambition de gagner des titres chaque année. Dans cette saison semée d’embuches, les hommes de Ronan O’Gara ont failli collectivement. Mais dans cette saison plus que compliquée, plusieurs joueurs ont surnagé. Même dans les heures les plus sombres, ces joueurs ont été les éclaircies du marasme qui a permis au supporters de (trop peu) vibrer pendant la saison.


L’Oscar Fièvre SR de la saison : Dillyn Leyds

Les saisons se suivent et se ressemblent pour le plus Rochelais des Sud-Africains. Auteur de huit essais toutes compétitions confondues, Dillyn Leyds est le meilleur marqueur du club cette saison. Aligné majoritairement à l’aile mais parfois replacé à l’arrière selon les besoins du groupe, le Sud-Africain de 31 ans a été l’un des joueurs les plus réguliers et décisifs du collectif maritime. Cette saison pour 21 matchs de Top 14 et 1617 minutes jouées, c’est 40 points marqués, 12 offloads et surtout 15 franchissements pour le natif de Somerset West.


Au-delà des statistiques, c’est par son intelligence de jeu, sa qualité de relance et sa lecture parfaite des espaces qu’il s’est imposé comme le dépositaire du jeu offensif rochelais. Capable de casser les lignes comme de distiller des passes décisives, Leyds a aussi été précieux dans son rôle de cadre auprès des plus jeunes. Sang froid sous pression, exemplaire dans les phases défensives (68 plaquages réussis), il s’est illustré tout au long de la saison par sa justesse rare. Un leader discret mais incontestable, dont la constance aura été un repère au cœur d’une saison bien en deçà des standards d’un club double champion d’Europe.


La confirmation : Oscar Jégou, l’étoffe d’un cadre affirmé

Il était attendu, il a répondu présent. La saison 2024-2025 a marqué un tournant décisif dans la jeune carrière d’Oscar Jégou, qui a définitivement changé de dimension au sein du Stade Rochelais. Longtemps considéré comme un espoir en pleine ascension, il s’est affirmé cette année comme un pilier du pack rochelais, enchaînant les titularisations et les prestations de haut niveau, aussi bien en Top 14 qu’en Champions Cup. Travailleur de l’ombre, mais jamais anonyme, il s’est montré précieux dans les zones de combat, enchaînant les plaquages à tour de bras, sécurisant les sorties de camp et contribuant à l’équilibre du système défensif rochelais.

Sa progression a également été reconnue au niveau international, puisqu’il a été appelé en équipe de France pour disputer le Tournoi des Six Nations, où il a su répondre présent dans un contexte ultra exigeant. Avec pour récompense le sacre à la suite de plusieurs victoires mémorables, notamment face à l’Irlande à Dublin. Cette reconnaissance n’a fait que confirmer ce que le staff rochelais savait déjà : Oscar Jégou est devenu un véritable cadre de l’équipe.

La prolongation de son contrat jusqu’en 2028, officialisée en février, témoigne de la volonté du club de s’appuyer durablement sur son profil travailleur, discret mais redoutablement efficace. À l’issue de cette saison pleine, Oscar Jégou a cessé d’être un simple espoir. Il est devenu un titulaire légitime, porteur des ambitions futures du Stade Rochelais.

La révélation : Hoani Bosmorin, l'éclosion d’un pur produit rochelais

Dans un effectif rochelais où la concurrence est rude sur les ailes, Hoani Bosmorin a su faire parler de lui cette saison. À seulement 20 ans, l’ailier formé au club s’est imposé comme l’une des révélations les plus prometteuses de l’exercice 2024-2025. Avec 15 feuilles de match en Top 14 et trois en Champions Cup, notamment le huitième de finale face au Munster, il a su saisir chaque opportunité pour afficher ses qualités. Ses performances ont fini par convaincre Ronan O’Gara de l’installer dans le groupe des titulaires. Il a ainsi pris par à tous les matchs des Jaunes et Noir à partir de la 16ème journée du championnat. Sa seule feuille de match manquée sera le match à domicile contre Perpignan pour le reposer.

En résumé, Hoani Bosmorin c’est quatre essais marqués toutes compétitions confondues, 11 franchissements et 15 points inscrits en Top 14 en une demie saison. Ses performances ont logiquement fini par taper dans l'œil de nombreuses écuries du championnat, lui qui était en fin de contrat à l’issue de la saison. Mais le Stade Rochelais, conscient du potentiel grandissant, a agi en sécurisant son avenir : Bosmorin a prolongé jusqu’en 2027 pour continuer son éclosion dans sa ville de coeur et son club formateur.

Dans une saison où l’équilibre entre jeunesse et expérience était crucial, Hoani Bosmorin s’est affirmé comme l’un des visages neufs du projet maritime. Au vu de sa nette progression, l’avenir du club est entre de bonnes mains jusqu’en 2027, et peut-être même plus qui sait…


Mentions honorables : la solidité dans la dureté

Si certains joueurs ont occupé le devant de la scène cette saison, d'autres ont œuvré dans l’ombre avec une régularité exemplaire. Grégory Alldritt a une fois encore tenu son rang avec rigueur. C’est l’un des rares Rochelais à ne pas s’être caché pendant la dure série de neuf matchs sans victoire. C’est en tant que capitaine qu’il a assuré une présence continue pour la caravelle jaune et noir qui pourtant ne cessait de tanguer… Si les Maritimes ont pu finir en boulet de canon cette saison avec cinq victoires consécutives, c’est en partie grâce à lui. Le seul point positif de cette élimination précoce, le natif d’Auch pourra avoir de vraies vacances et se régénérer à 100% avant de débuter un nouveau cycle avec le Stade Rochelais.

Autre profil discret mais incontournable : Judicaël Cancoriet. Aligné sur plus de vingt feuilles de match cette saison, il a fini meilleur plaqueur du club (166 plaquages réussis en Top 14) et s’est régulièrement illustré par ses grattages efficaces et son volume de jeu impressionnant. Sa constance physique, alliée à une grande discipline, a fait de lui un rouage essentiel de la troisième ligne rochelaise. Notamment pendant les périodes de doublons ou l’ancien Jaunard a su répondre présent, même si les résultats collectifs n’ont malheureusement pas suivi.

Enfin, Paul Boudehent réalise une très bonne saison, même si elle a été tronquée par une blessure au thorax et ses convocations avec le XV de France. Utilisé de manière polyvalente en deuxième ou troisième ligne, que ce soit en couverture défensive ou en soutien offensif, il a su répondre présent à chaque fois que le staff a fait appel à lui. Propos parfaitement illustré par son magnifique doublé contre le LOU dont un essai dans une position de parfait ailier. Ce qui caractérise le plus le natif d’Anger, c’est sa constance et sa disponibilité : il incarne ce profil de joueur qui permet à ses coéquipiers de briller en toute sécurité. En somme, un homme de devoir, essentiel à l’équilibre d’un effectif qui vise haut. Sa saison 2024-2025, sans bruit mais sans faille, en fait l’un des piliers silencieux de cette équipe rochelaise.

Cette cinquième saison en tant que manager principal ne laissera pas un souvenir impérissable à Ronan O’Gara. Il l’a lui-même confirmé en conférence de presse à l'issue du match contre Pau : “C’est une fin de cycle”. Mais cette reconstruction pour la saison 2025-2026 ne débutera pas de zéro. Le club et le staff ont à leur disposition un groupe de joueurs qui réunit expérience et jeunesse. Il est clair que ce n’est pas suffisant, cette saison nous l'a bien montrée. Mais c’est toujours plus simple d’entamer un nouveau cycle avec les joueurs qui ont emmené le club par deux fois au sommet de l’Europe. C’est maintenant à la direction sportive de capitaliser sur ces acquis tout en injectant du sang neuf à l’effectif. Au milieu de toutes ces incertitudes, il n’y a qu’une seule vérité : la caravelle jaune et noir finira par regagner les sommets !


                                                 Paul Franc


© Icon Sport